Pendentif

Pendentif
BO calcédoines de Namibie et diamants

lundi 23 août 2010

Collection hiver 2009/2010

interview de France Thierard par le site Paliocréation




France Thiérard, vous êtes créatrice de bijoux. Depuis quand et qu’est-ce qui vous a conduit sur ce chemin ?
C’était il y a trois ans et c’est pour moi une jolie histoire. La ville de Venise aura joué un rôle déterminant. Je m’y rendais fréquemment pour rechercher une inspiration et un matériaux dans la perspective d’écrire un guide insolite sur la ville. J’avais publié auparavant un livre sur la Comédie Française « Chère Comédie Française » qui m’avait procuré beaucoup de plaisir et je voulais rester dans la veine de l’écriture...
Curieusement et subitement au cours de cette quête vénitienne, j'ai été fascinée par des perles anciennes de Murano alors que les perles en général ne m’ont jamais intéressé. Petite fille, je ne m’étais jamais livrée au jeu d’enfiler des perles et de faire des colliers. Mon intérêt pour les bijoux est beaucoup plus tardif, lié à mes voyages d’où je ramenais, un peu comme les explorateurs, des trésors qui n’avaient qu’une valeur symbolique.
Je me souviens très bien, c’était le jour de mon anniversaire, marchant dans les rues de Venise, je me proposais d’aller explorer dans la ville des lieux insolites pour les futurs lecteurs du guide. Et par hasard, à côté de l’église dei Greci, j’ai découvert un antiquaire. Il y avait une urne remplie de perles anciennes de Murano. Je suis resté au moins quatre heures dans ce magasin sous le regard incrédule de la vendeuse. En guise de cadeau d’anniversaire, je me suis offert un tas des perles. Une fois rentrée à Paris, je m’interrogeais sur ce que j’allais en faire. J’ai décidé de créer un sautoir avec un fil acheté au Bon Marché. Le fait de jouer avec ses perles, de faire une composition m’a procuré un plaisir immense et immédiat. J’étais très fière de ce collier que je portais toujours sur moi. Une amie, Maryline Chadé, propriétaire d’une très jolie boutique de bijoux rue des Saints Pères m’a demandé qui était la créatrice ce collier car elle aimerait bien les vendre. Je lui ai dit que c’était moi et c’est parti comme cela.
Ce qui est incroyable, c’est qu’en démarrant je me suis tout d’un coup souvenu qu’en parallèle de mes études à l’Ecole du Louvre, j’avais fait l’Institut National de Gémologie. J’avais refoulé cette expérience au fonds dans ma mémoire. Alors, une fois ce souvenir exhumé, j’ai eu envie d’associer aux perles de Venise des pierres fines. La petite collection au départ a commencé comme cela avec mon désir de retrouver ces pierres que j’avais étudiées, vingt ans auparavant.
Ce premier collier a fait des émules puisqu’une chroniqueuse du magazine ELLE l’a remarquée et en a fait une publication très élogieuse. Je me suis senti portée et j’ai frappé aux portes des magasins que j’aimais pour aller leur proposer mes créations. Parallèlement, j’ai commencé des premières ventes privées qui ont connu beaucoup de succès. Par effet de boule-de-neige, j’ai obtenu de nouvelles publications dans la presse et j’ai pu immédiatement être référencé dans des magasins Franck et Fils.
Dans le même temps, j’ai fait la connaissance de Frédérique Picard, Directrice d’Annick Goutal, maison qui représente pour moi le raffinement extreme en matière de parfumerie. Elle m’a demandé de réfléchir à une collection de bijoux qui puisse incarner le style de la marque.
Mon lien avec l’écrit et à l’écriture était toujours aussi actif; j’ai eu envie de travailler sur le nom des parfums. Ce n’est pourtant pas cette orientation créative qui été retenue par la maison Goutal mais elle a inspiré ma propre collection. J’aimais le principe d’insérer des mots dans une parure. Ainsi est venue l’idée des phrases gravées sur des plaques, associées à des pierres fines. Chaque nouvelle phrase étant comme un « incipit » du bijou.
J’ai donc été rechercher des phrases dans des textes classiques. J’avais beaucoup aimé une pièce donnée au vieux Colombier Monsieur de Pourcognac et dans ce te texte il y avait une phrase que me touchait particulièrement « que soupirer d’amour est une douce chose ». Je devais être sans doute très amoureuse à cette époque !
Vous voyez donc mes muses ont été Venise, les mots et les pierres aimés enfouis dans ma mémoire. D’ailleurs, quand j’ai commencé à faire évoluer mes collections en utilisant d’autres matériaux et bien, à la manière d’un porte-bonheur, j’ai souhaité conserver sur chaque sautoir au moins une perle de Venise par fidélité et gratitude pour la bienveillante Sérénissime.
Vous présentez désormais deux collections annuelles, une collection d’été et une collection d’hiver. Ces deux dernières collections vous ont été inspirées par quoi ?
Les mots reste mon fil rouge. Mais j’ai eu aussi envie de travailler sur la thématique du cercle et de l’anneau. Je suis tombé sur une phrase de Giraudoux dont la poésie et le caractère presque surréaliste m’ont amusé « la terre est ronde pour ceux qui s’aiment » et c’est devenu la titre de la collection. La sphère sous-toutes ses formes y est très présente : les anneaux des boucles d’oreilles, les trois anneaux du pendentif, la plaque ronde gravée.
Où se situe pour vous le vrai plaisir de la création ?
En premier lieu, dans la recherche des pierres qui vont susciter mon envie. Je suis fasciné par la « taille » des pierres et je suis à la recherche de nouvelles tailles ou d’anciennes tailles à remettre au goût du jour. J’aime aussi infiniment découvrir de nouveaux artisans qui me proposent des matériaux nobles ou insolites; leur créativité est une pour moi une grande source d’inspiration.  En ce moment par exemple, je travaille sur des manchettes de cuir avec des pierres de quarante carats, l’artisan avec qui je coopère est un homme exceptionnel. Son amour du travail m’émeut et me transporte, au sens littéral du terme.
Quelle place occupe dans votre imaginaire les êtres à qui vous destinez vos créations ?
Je crée aussi bien pour des femmes que pour des hommes. Mes plaques gravées notamment sont très appréciées par une clientèle masculine qui les achètent pour les porter. Pour parler des femmes, je ne peux pas dire qu’il y ait une femme en particulier, elles sont toutes là dans mon esprit. J’aime la différence et j’aime l’objet unique. Il me plait autant de travailler pour une petite fille de 9 ans que pour une femme plus mûre.
Quant aux hommes c’est Christophe Robin qui est un talentueux coloriste qui m’a donné envie de créer pour eux. Comment je les imagine ? des hommes de caractère, affirmés qui n’hésitent pas à « déclarer et à se déclarer » en portant me plaques gravées.
Je pense à cette phrase dans Cyrano de Bergerac  « j’ose être enfin moi-même et j’ose » voilà une phrase dont j’imagine aussi bien qu’un homme ou qu’une femme puisse la porter à son cou, vous ne pensez-pas ?
Dans quelles boutiques êtes-vous distribuée ?
Je développe la présence de marque d’une manière très sélective. Au-delà du réseau de magasins Franck et Fils, je suis représentée dans des boutiques qui me sollicitent dont j’aime le style et qui correspondent à mon univers de création. Je présente également mes ventes dans des collections privées qui sont un moyen très utile pour moi d’allant au devant de mes clientes et de saisir leurs réactions et leurs aspirations.
Quelle est la prochaine étape ?
Depuis un an, j’ai déjà franchi une en passant de la fantaisie à la haute fantaisie, en commençant à travailler l’or. La prochaine étape, je l’espère sera le diamant …